« J’ai bien conscience qu’une telle phrase donne un sentiment de déjà-vu. »
C’est une histoire mille fois racontée ; elle est ici deux fois prévisible. D’abord parce que le thème de l’écrivain desséché a été disséqué à maintes reprises. Ensuite parce que la narratrice tue le suspens dès les premières lignes du roman.
D’après une histoire vraie s’enfonce dans un narcissisme académique déconcertant. Poncif, structure en triptyque, rythme ternaire, style faussement hésitant, surenchère des périphrases alourdissent le texte chétif et maladroit. Delphine de Vigan s’applique. Le lecteur s’agace.
Alors, digression ou diversion ? Derrière cette naïveté crispante pourrait se cacher le double jeu de l’autrice. L’idée de la manipulation fait discrètement son chemin et le caractère désormais performatif de l’œuvre brouille les pistes de réflexion. On ne sait plus si l’on a sauté à pieds joints dans le piège tendu par Delphine de Vigan ou si l’on cherche une excuse suffisamment sensée pour justifier ce que l’on vient de lire. À l’image de la vie de L., tout semble emprunté dans ce roman. Faut-il en saluer l’audace ou en dénoncer l’imposture ? La démarche est gonflée et laisse un goût amer au lecteur exaspéré par tant de facilité, finalement obligé de s’avouer que tout ça fonctionne plutôt bien.
« Il lui dit que si elle n’arrive plus à parler, elle devrait peut-être écrire. Pour elle-même. Elle aime bien écrire, non ? Elle ne dit rien. Elle pense très fort à ces mots qu’elle ne peut pas dire, elle pense le plus fort possible pour qu’il l’entende, suis-je si laide, si ridicule, si différente, si voûtée, si mal coiffée, si méchante ? J’ai peur de devenir folle. J’ai peur et je ne sais pas si cette peur existe, si elle a un nom.